Voici ce qu’écrit soeur Faustine à l’intention de son père spirituel
pour l’année 1937, à la fin d’une longue prière :
« Ô mon Jésus, transforme-moi en toi, car tu peux tout. » (PJ 163)
Méditation :
Oui, le Seigneur peut tout, et tout est très simple en Dieu, tout est réalisé pour qu’il nous montre son amour avec une économie merveilleuse. Autant la création est fascinante dans sa complexité dont le secret nous échappe sans cesse, autant l’amour de Dieu pour nous sauver de la mort est manifesté de façon tellement simple que l’humanité n’y prête même pas attention.
Les extravagances sont remarquables, mais l’humilité n’étonne pas, la pauvreté attire le mépris et les yeux s’en détournent. Demander à Jésus de nous transformer en lui est-il bien enviable… Pourquoi me mettre dans une situation où ma liberté personnelle est remise à Dieu.., pourquoi prononcer des voeux par lesquels je m’abandonne à Dieu corps et âme.., pourquoi exposer ma pauvreté volontaire au regard des hommes…
Pour le disciple du Christ, il n’y a cependant pas autre chose à demander en réalité, et c’est dans cette évidence qu’il peut devenir l’instrument de la miséricorde du Seigneur. Il faut consentir à perdre pour être transformé en Jésus Christ, c’est-à-dire pour devenir comme Jésus Christ. Comme le Roi de gloire, entièrement soumis à la volonté du Père ; comme le Roi de gloire remettant sa vie pour la vie du monde ; comme le Roi de gloire portant la croix des autres ; comme le Roi de gloire qui prie seul dans la nuit et dont la cour royale est composé d’anges qui le réconfortent et le servent ; comme le Roi de gloire juste Juge qui ne condamne pas le pécheur, mais qui pose seulement son regard clair sur lui et qui le renvoie à sa conscience en lui rappelant la loi de l’amour de Dieu.
Tout cela est d’une très grande simplicité, tout le monde y a accès, chacun peut demander à devenir ce roi de gloire pour l’humanité. Soeur Faustine nous le dit bien, chacun peut faire cette prière : Aide-moi, Seigneur, à devenir comme toi miséricordieux, car la miséricorde ne vient que de toi et elle me semble trop difficile pour mes seules forces d’âme. Aide-moi, car c’est en toi qu’être miséricordieux devient possible et simple. Sans toi, nous ne pouvons rien faire. C’est qu’il faut une grande force d’amour pour se détacher de soi, pour quitter les vanités du monde, pour être bon.
Oui, même si cette force est donnée par Dieu à toute l’humanité croyante ou non croyante, son feu est entretenu par la grâce que Dieu nous donne en Jésus Christ, par la communion qu’il nous propose.
Le Seigneur Jésus nous montre sans se lasser les deux moyens de cette communion : de son coeur transpercé sortent deux rayons de lumière, deux forces d’amour transperçant notre monde d’aujourd’hui qui préfère de plus en plus les ignorer. D’une part, le baptême, et son renouvellement dans le sacrement de la réconciliation par lequel Dieu et l’homme acceptent de renouer sans cesse les liens les plus simples de leur amour mutuel ; et, d’autre part, l’eucharistie par laquelle Dieu a inventé une autre merveille d’amour, le moyen le plus fou et surtout le plus simple de l’union de Dieu et de l’homme : dans la communion, Jésus transforme le croyant qui accepte de s’unir à Lui, en envahissant son corps et son sang.
Sans le secours de ces grâces, nos bontés et nos bienveillances toutes humaines risquent grandement d’être corrompues, assaillies par toutes sortes de tentations orgueilleuses qui replacent chacun de nous au centre du monde. Alors que si nous laissons Dieu entrer en nous, en concevant la contrition véritable et la pureté du coeur, en concevant la confiance totale, si nous laissons Dieu pénétrer jusqu’au plus profond de notre coeur par un chemin libéré de l’orgueil, de l’égoïsme, de l’inquiétude et de l’insatisfaction, alors, Dieu nous transforme, par une opération si simple et si douce que nous avons l’impression de ne jamais avoir existé auparavant, de ne plus connaître l’être ancien dont nous nous dépouillons puisque Dieu fait un avec nous.
Seigneur Jésus, transforme-moi en toi, pour me rendre capable d’être un instrument de ta miséricorde. Transforme-moi en toi, car tu peux tout.
fr. Pierre Sokol et Isabelle Kamaroudis
relecture par le Père Dominique Aubert