Voici ce qu’écrit soeur Faustine, à l’intention de son père spirituel,
le 10 janvier 1938 :
« Pendant la méditation, le Seigneur m’a fait connaître la joie du ciel et des saints qui se réjouissent de notre arrivée. Ils aiment Dieu, l’unique objet de leur amour, mais ils nous aiment, nous aussi, avec tendresse et affection. Cependant, cette joie qui se répand en tous vient du visage de Dieu, parce que nous voyons Dieu face à face. Et son visage est si adorable que l’âme tombe dans une nouvelle extase. » (PJ 1592)
Méditation :
Nous nous adressons aux saints de notre Eglise parce qu’ils nous permettent de nous approcher de l’inapprochable, de l’inconcevable, du Tout- Autre, qui désire être recherché, être approché des hommes. Nous avons besoin de leur aide précieuse, nous croyons à l’intercession de ces âmes purifiées, qui
sont des instruments de Dieu depuis leur vie terrestre, comme nous le sommes, nous aussi, lorsqu’on s’adresse à nous pour arranger une affaire difficile et la porter dans la prière. Et notre premier secours est Marie dans tous ses sanctuaires du monde et dans toutes nos maisons.
Le chemin vers l’Inapprochable est toujours celui de l’humilité et c’est Jésus nous donne les moyens de le suivre. Marie, servante inconditionnelle, nous montre toujours ce chemin que tous les saints ont recherché et où ils se sont engagés. C’est même ce qui définit avant tout la sainteté : se reconnaître incapable d’agir par soi-même et s’en remettre en toute chose à la volonté et à l’action de Dieu sur nous et dans le monde.
Vivre l’humilité pour voir Dieu. Pour voir son visage : son visage rayonnant de la joie de Pâques, et son visage couronné d’épines, qui collecte en lui toutes les épreuves de l’humanité et que nous avons pour devoir de regarder en face, droit dans les yeux. Son visage du Tableau de la Miséricorde, ressuscité
mais énigmatique par son regard trouble extrêmement attachant.
Le visage du Tableau original que soeur Faustine a commandé et vu peindre est troublant parce que Jésus ne nous regarde pas en face mais qu’il plonge son regard sombre dans le monde intérieur de toutes les sortes d’humanité qui se tiennent au pied de sa Croix. Et le regard du Tableau de 1944 qui se trouve
au Sanctuaire de Cracovie et à Gallardon est troublant justement parce qu’il nous regarde en face, mais dans une buée et un peu penché, ce qui nous interroge avant tout sur nous-mêmes : car d’où vient que nous avons si peu de douleurs de nos péchés ? C’est que nous regardons peu Jésus en face, c’est que nous l’aimons trop peu, c’est que nous nous demandons très peu quels péchés nous avons faits pour que le Seigneur Jésus notre Roi ait tremblé, transpiré du sang, et supplié son Père de lui éviter la Passion et la Croix (Voir Saint Claude La Colombière, 2ème méditation sur la Passion 1678). Regarder cette humilité de Dieu, voilà ce qu’ont fait les saints, et voilà ce qu’ils contemplent toujours car Jésus est le même hier, aujourd’hui et demain.
Saint Irénée de Lyon écrit que « l’homme par lui-même ne verra pas Dieu, mais que Lui, Dieu, sera vu des hommes s’Il le veut, quand Il veut, comme Il veut. » (Irénée de Lyon, (IIème s.) Contre les Hérésies, 4, 20, 4-5)
Demandons au Seigneur de nous aider à comprendre son visage adorable, acceptons qu’il plonge du regard dans nos plus grandes profondeurs, qu’il nous bouleverse et nous transforme. Acceptons de conserver en nous une parcelle de ce regard grave de Jésus Miséricordieux pour nous rappeler sans cesse à reconnaître et à rejeter notre vacuité et nos orgueils et à redire en toute circonstance « Jésus, j’ai confiance en Toi. »
fr. Pierre Sokol et Isabelle Kamaroudis
relecture par le Père Dominique Aubert